Chronique sur l’avenir des nos entreprises et reflexions sur leur gouvernance
La crise économique et financière qui touche de manière hétérogène les économies mondiales nous oblige à nous interroger quant au choix de notre modèle économique et social.
Les marchés dominent la raison des entreprises et pervertissent une gouvernance saine et durable qui a fait, il fut un temps, l’âge d’or de l’Europe et de l’Amérique du Nord.
Il s’agit désormais de contenter l’actionnaire au mépris de stratégies industrielles et humaines viables. Seuls les marchés ou plus précisément le cours de l’action gouverne et donne le droit de vie ou de mort, éventuellement un sursis aux entreprises qui ont depuis un long moment montrés les failles de leur résistance à la pression financière. En effet, l’ère est au court terme et non plus à la vision d’entreprise. Cela semble satisfaire les marchés mais au prix du mépris d’entreprises qui vivent sous un stress permanent et de salariés qui année après année perdent le goût du travail car dorénavant dénué de sens.
Alors, à l’ère du capital humain prôné par les entreprises, il serait temps que la réalité rejoigne les mots pour lutter contre les maux de l’industrialisation voire de la désincarnation du management consécutif à une trop forte marchaéisation de l’économie.
Oui, le temps est venu de définir et mettre en œuvre une gouvernance saine, durable et convaincante pour redonner sens au travail, aux dynamiques industrielles et au fond à la vie.
La mondialisation ne peut se faire au détriment du social ou du destin des hommes et des femmes qui composent les premiers pays industrialisés. Il est donc devenu vital de définir un pacte mondial, économique et social dont la vocation serait de préserver les équilibres mondiaux car la morale de la compétitivité ne peut pas être au dépens des salaires des pays développés et au bénéfice des patrons dont le salaire est indexé sur la courbe de l’action en guise de bénéfices.
Il s’agit précisément de réinventer une gouvernance différente, innovante et performante pour concilier économie et progrès social et humaniser ainsi, peut-être un peu, les marchés.
Dans cet esprit, le recrutement d’une nouvelle génération d’administrateurs doit être une piste de réflexion car le challenge d’avenir est de casser la spirale des administrateurs séculaires, de pères en fils, dont l’objectif n’est en réalité que de préserver le cercle vicieux d’intérêts conflictuels mutuels et, en définitive, d’être au seul service des marchés.
Cette réflexion est de mise car dans le cadre de mes fonctions de chasseur de tête, je vois le cynisme gagner de la part d’un nombre croissant de candidats ; ils croient de moins en moins en l’entreprise et ne leur accorde qu’une confiance relative de toute façon conditionnée à une relation « gagnant – gagnant ». Par exemple, la nouvelle génération de candidats ne désire plus sacrifier sa vie et ses loisirs au profit d’entreprises qu’ils jugent amorales et avides de bénéfices, très souvent à leurs dépens. Le rapport de force s’inverse avec plus ou moins de force selon les secteurs ou la pénurie de telle ou telle fonction.
Alors, en France où l’engouement entrepreunarial reste à vérifier, la question est de savoir quel avenir, quel monde souhaitons-nous laisser aux générations futures ? Pourrions-nous nous satisfaire d’une société totalement désindustrialisée ou d’un pays en repli sur les marchés pour lesquels nous devrions compter parmi les leaders ?
Ce sont de vraies questions qui justifient que la gouvernance éthique résiste à la dictature de la finance pour redonner sens au travail et, aux générations futures, l’envie d’en découdre et de gagner la guerre du « néocapitalisme vert ».
Les collaborateurs ont envie de donner, de s’amuser, d’accompagner leur entreprise à penser haut et loin pour sortir victorieux de la compétition mondiale. Les stratégies d’entreprises devraient à nouveau parier sur l’élan intellectuel et la motivation des salariés au travers d’une politique économique cohérente et d’un modèle de redistribution juste et motivant. Ce rêve de demain pourrait tout simplement démontrer que la finance et le respect de l’implication des hommes et des femmes qui composent les entreprises ne sont pas incompatibles.
En France, nous avons su faire la Révolution et nous avons des idées ; peut-être est-il le moment de révolutionner notre rapport à l’entreprise avec nos idées, sans arme, ni violence ?
Nicole D, Chasseur de têtes